La réaction de Kakashi étonna Madara, aucun effroi ni stupéfaction et encore moins de l'animosité ne semblait naître en lui. En fait il se mit à rire, comme si les paroles de l'Uchiwa n'était dû qu'à une crise d'infériorité hilarante. Le petit Chuunin lui tapota l'épaule et il divagua des propos inintelligible. Madara restait bouche-bée, jamais ô grand jamais quelqu'un n'avait réagi de cette manière. Néanmoins il préférait largement l'attitude moqueuse de Kakashi que les innombrables regard noir venant des habitants et de son clan. Madara le gratifia d'un sourire réservé. La sonnerie retentit et Hatake s'arrêta instantanément de s'esclaffer - bien qu'il garda son regard caustique - puis ils se levèrent pour partir en direction de la salle précédente.
Kakashi n'arrivait pas à croire que les autres craignaient le petit Uchiwa à cause de sa ressemblance frappante avec celle Du Madara dictateur, terrassé il y a une centaine d'année. De quoi alimenter la haine d'ores et déjà bien nourrie au creux de son cœur rocailleux. «
Décidément ces connards ont le cerveau plus-que ramollit ! » Persiflait Kakashi à chaque fois qu'il apercevait un habitant. Il se sentait légèrement coupable ; Madara était une personne très gentille qui subissait les pires maltraitances et lui,
le grand et terrible Ki ! - un surnom stupide offert de bon cœur par ses camarades - avait droit à une famille d'accueil très chaleureuse. Une injustice frappante, mais équitable dans un sens. Le bien malheureux et le mal aisé. Quelqu'un - Dieu ou autre - s'était amusé à inverser les conditions de vie appartenant à ces deux êtres, tout en respectant l'équilibre. Ce qui donnait ce résultat si injuste à l'égard de la société. Kakashi n'avait jamais cru en un quelconque être surnaturel ayant créer l'Homme à son image, «
Toute façon si c'est bien le cas, 'doit être aussi con qu'un balais doublé d'une grosse tête ! » disait-il lorsqu'un débat sur ce sujet se déclenchait. Non, le petit Chuunin ne vénérait aucun Dieu. Ni même ceux de son ancienne Tribu, exterminée bien avant sa naissance. Wootāt, plus communément appelé Hatake par les villageois car ils s'en prenaient au récolte, tels des milliers de sauterelles dévorant tout sur leur passage. D'ailleurs ces sauterelles là haïssaient Konoha, elles traitaient les habitants d'hypocrites « bisou-bisou » - parce que la volonté du feu sonnait comme un conte de fée à leur oreille, et on sait tous que l'imaginaire est le siège du rêve *fallacieux. Mais la raison de leur mépris était surtout dû à la disparition de leur territoire, envahi par eux. Les Wootāt avaient même reçu une invitation de leur part, pour rejoindre la niche. La destruction des champs et quelques farces en guise de réponse ont suffit pour transformer le rêve « bisou-bisou » des habitants de Konoha en cauchemar « frappe-frappe ».
«
Mon fils, je suis sûr que c'est toi l'élu... » affirmait le père de Kakashi, tous les jours et toutes les nuits avant qu'il ne se suicide. C'était l'excuse pour obliger son fils à porter ce masque qui le grattait sans arrêt, parce que soit disant les frères Kae & Shi - deux divinités symbolisant la fourberie et la jeunesse pure et éternelle - s'étaient incarnés en lui. Pour les Hatake, le visage symbolisait la perfection de l'âme et de la beauté éternelle - donc de la jeunesse - et il se trouvait que la figure de Kakashi était parfaitement symétrique, belle et gracieuse. La légende voulait que toute personne voyant le visage de Shi - le Dieu de la beauté éternelle, et aussi de la passion - se retrouvait passionnée - même pas amoureuse, passionnée ! - par lui. «
Tu ne veux pas que tout le monde se jette sur toi non ? » l'avertissait son paternel chaque fois que celui-ci sortait dehors. Adieu l'apparence du garçon ordinaire et bonjour celle du coincé stéréotypé ! Coincé qui n'était, évidemment, pas humain.
Toute la classe était captivée par le petit Chuunin, pour qu'un jeune de leur âge osait parler sur un ton moqueur et fier à leur professeur autoritaire, il fallait plus-que du courage. Lorsque celui-ci franchit le seuil de la porte accompagné de Madara, une assemblée d'étudiants les encerclaient et les bombardaient de questions, tels des journalistes et paparazzis qui étouffaient les pauvres stars angoissés en les mitraillant de flash et de micros sous leur nez.
« Vos gueule bande de cons ! » Les journalistes s'arrêtèrent instantanément.
Le professeur entra, il semblait de mauvaise humeur -
comme d'habitude ! Pensèrent en chœur les élèves - et les enfants retournaient aussitôt à leur place. Le sensei héla Kakashi et lui demanda de rester près de lui pour faire la « foutue » présentation puisqu'il ne supportait pas de s'avouer vaincu face à un garnement, même si celui-ci était un Chuunin. Lorsque le calme survint enfin, le maître hocha la tête en direction d'Hatake.
« Bon... Vous voulez que je fasse ma présentation ? Ben je vais la faire tiens... cracha-t-il au professeur avant de retourner son regard vers les élèves, moi c'est Kakashi Hatake. Je reste que deux semaines car oui, je suis déjà Chuunin bande de cons ! »
Les étudiants restèrent interdit, la bouche et les yeux grands ouverts. Le professeur quant à lui fit une mine indignée : il abhorrait les mots grossiers, tel « bande de cons » et punissait les élèves utilisant ce genre de termes. Mais là, venant de ce monstre, il préférait encore se taire.
« Comme vous 'voyez, j'ai pas d'bandeau car je l'ai retiré avant de venir ici, pour éviter d'attirer l'attention sur moi dès le début, continua Kakashi, et comme vous pouvez le constater j'porte un masque et j'ai les cheveux gris mais j'suis pas albinos O.K ?! C'est génétique, je tiens la couleur de ma Tribu. »
Les élèves allaient protester en lui posant la question fatidique, mais avant que leur corde vocales ne s'activèrent, Kakashi continuait en haussant la voix.
« Pis, oui j'ai huit ans ! Et j'allais oublier, si je suis là c'est parce que c'est qu'un stage, OK les mioches ? Bon, salut. » Sur ces derniers mots, il alla s'assoir à la même place lors de son arrivé, à côté du même enfant martyr.
Le professeur, satisfait, reprit son cour en employant le même ton austère et élevé que Kakashi lors de sa présentation.
*
**
« Tu es très intéressant comme garçon. »
Kakashi contemplait les magnifiques yeux en amandes de son nouvel ami, ne faisant nullement attention au compliment qu'il venait de lui confier.
« Merci au fait... dit Madara, la tête baissé. »
Le petit Chuunin ne prononça aucun mot et joua avec les longs cheveux hérissés de Uchiwa. Celui-ci eut un frisson, personne - hormis son grand frère - n'osait l'effleurer à part pour s'en servir comme punching ball. Ses joues blêmes s'empourpraient furtivement. Le pauvre petit ne savait plus où se mettre, les caresses d'Hatake étaient fort agréable mais très déconcertante. De plus, la plupart des élèves jetaient des regards curieux vers eux, certains pensaient même qu'ils étaient en couple.
« Tes cheveux sont secs, Mada', dit enfin Kakashi.
- Ben... tu sais... je peux pas tellement m'en occuper. Et puis...
- T'sais que Madara c'est un prénom de fille ? l'interrompit Kakashi en changeant de sujet. »
Madara était effectivement un prénom plutôt féminin, et celui-ci le savait, mais puisqu'il tenait son patronyme de son ancêtre alors connaître sa véritable origine ne l'intriguait guère. La main de Kakashi s'éclipsa dans cette forêt noire, épineuse et touffue pour réapparaître ensuite sur le sommet de la colline sombre. Madara secoua la tête, cette fichue main le gênait plus qu'autre chose. Il essaya de se recoiffer, en vain. Sa tignasse persistait et ne désirait plus reprendre sa forme originelle - qui d'ailleurs n'avait presqu'aucune différence avec celle-ci. Uchiwa réprimanda discrètement Kakashi. Comme réponse, il haussa les épaules et fit mine de se concentrer sur sa table en bois.
« Vous sortez ensemble ou quoi ? dit une voix de petite fille un peu trop curieuse. »
Kakashi releva sa tête : Les trois gamines justes en face d'eux s'étaient retournées et les fixaient d'un air méprisant.
« T'as un problème connasse ? cracha le petit Chuunin lassé de ce genre de remarque futiles. »
Les trois fillettes furent outrées par ce mot si grossier. C'était la première fois qu'elles entendaient ce gros-mot, la deuxième fois pour celle du milieu : son père avait une fois traité sa mère de « connasse » et il lui avait expliqué que jamais elle ne devrait l'employer, sauf en cas de nécessité. «
Comme lorsque ta mère me fait chier ! » avait déclaré son paternel avec fierté.
« Me parle pas sur ce ton ! cracha la fille placée au milieu, certainement celle qui venait de poser la question.
- On va le dire au professeur ! rajouta l'autre à droite. »
Madara était totalement effaré, il ne supportait pas les disputes et encore moins les insultes. Il fallait y mettre un terme avant que le pire n'arrivait.
« S'il vous plais, arrêtez... intervint l'Uchiwa, un peu à côté de la plaque. »
La tête que tirait le professeur en cherchant d'où provenait ce brouhaha suffit à dissoudre toute rébellion en lui. Madara baissa automatiquement les yeux et plaça ses mains entre ses jambes. Le sensei interpella d'une voix agressive les cinq perturbateurs, son regard cinglant les transperçait un par un, toutefois il se fit plus doux - ou plutôt apeuré - lorsqu'il dévisagea Kakashi. Il ne le quittait pas d'une seconde, comme hypnotisé par ses pupilles malsaines. Les gamines voulaient se justifier mais elles n'osaient même pas ouvrir la bouche. Après un long silence et un combat de regard entre le petit Chuunin et le maître, celui-ci se rasséréna et reprit son cours comme si de rien n'était.
Une demi heure d'ennui plus tard, la sonnerie retentit, réveillant une bonne partie de la classe. Exténué, Kakashi sorti en trombe de la salle, suivi de près par les élèves radieux : la pause déjeuner débutait enfin ! Madara quant à lui sortit vers les derniers, ses camarades risqueraient de l'emmerder s'il sortait en avance. Seul devant la porte, il cherchait du regard le petit Chuunin mais aucune trace ne prouvait sa présence. Il n'y avait que des cris, un brouhaha sonore qui inondait le couloir entier. Un peu déçu et apeuré, Uchiwa se déplaça vers la droite, en direction de la récréation, là où tout le monde se rassemblait pour manger. S'il ne trouvait pas Kakashi, il chercherait son grand frère.
Kakashi était, encore une fois, le centre de l'attention des élèves : ils voulaient tous savoir si l'amour entre lui et Madara existait depuis longtemps ou pas, si « ça faisait mal au cul lorsqu'on se prenait le kiki dans le mille. », des questions toute aussi idiotes qu'incompréhensibles. Même si Hatake niait de sortir avec Madara, la plupart se persuadait du contraire. Les «
putains » et les «
ta gueule sale con ! » n'amélioraient guère la situation. Non vraiment, Kakashi ne supportait plus ces imbéciles. Il désirait seulement s'occuper de Uchiwa, s'amuser avec ses cheveux car il appréciait la forme et voilà que des gamins le harcelaient pour homosexualité prohibé. Jamais le petit Chuunin n'avait éprouvé de l'attirance pour un garçon, seules quelques filles méritaient de prendre ses lèvres mais uniquement pour le plaisir charnel. Madara était juste un ami, un ami qui d'ailleurs appartenait au clan le plus important et souffrait de maltraitance. Un bien bel ironie du sort. Il défonça la porte menant à l'extérieur et décida d'écouter ses pulsions primaires, c'est-à-dire de taper quiconque osait s'approcher de lui. Une bataille perdue d'avance s'entamait : le Chuunin contre les étudiants.
* tromper pour nuire.